La santé physique, pilier critique au succès d’une stratégie de santé en entreprise

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Lorsque les programmes de santé en entreprises sont apparus en Europe, il y a une vingtaine d’années, l’accent était alors principalement mis sur la santé physique. Ces programmes comprenaient : 

  • Des initiatives pour arrêter de fumer ;
  • Des campagnes axées sur l’ergonomie ;
  • Des fitness pour les employés : 
  • Des défis sportifs pour augmenter le nombre de pas quotidien à faire en équipe ;
  • Des campagnes de nutrition, avec les fameux paniers de fruits gratuits ;
  • Voire même si vous aviez de la chance, des massages assis. 

La stratégie santé et les programmes qui y sont rattachés ont bien évolué depuis. Les employeurs utilisent maintenant des programmes de bien-être pour accroître l’engagement des employés et contribuer à devenir un employeur de choix. Les organisations le font en combinant des initiatives en matière de bien-être traditionnels avec du développement de carrière, d’accent mis sur le sens donné au travail, l’ensemble en accord avec les valeurs de l’entreprise.  

Ainsi, tout ce qui était avant au cœur de la santé en entreprise, tout ce qui faisait rêver les employés qui ne travaillaient pas chez Google et qui n’avaient donc pas les massages gratuits, la table de ping-pong et le baby-foot dans la cafétéria, les fruits offerts, ni le coin thé en vrac pour la pause de matin, est maintenant une sorte d’à côté agréable mais plus forcément motivant, ni si important. Ou alors il passe pour un acquis qu’on s’attend à avoir – « un fitness sur mon lieu de travail, c’est juste normal non ? » – mais dont on ne remarque l’absence que quand justement il n’y en a pas. 

Et pourtant, ne ferions-nous pas fausse route aujourd’hui en délaissant quelque peu les aspects de santé physique ? Quand on sait qu’il existe un vrai gap entre ce que les employés apprécient et attendent d’un programme de bien-être et ce que leurs employeurs leur offrent (voir le rapport de Deloitte 2018 Global Human Capital Trend), peut-être devrions-nous repenser notre stratégie pour mieux répondre à ces besoins et aux risques en termes de santé physique.

Oui, les employés apprécient un espace dédié au bien-être, comme une salle de repos ou de méditation, oui ils apprécient aussi une offre de snacks et autres nourritures saines sur leur lieu de travail et oui ils apprécient également des programmes d’aide pour arrêter de fumer, pour perdre du poids ou encore bénéficier d’un check médical offert au sein même de l’organisation. Pour autant, au travers des trois exemples mentionnés, il reste un écart immense entre ce que les employés apprécieraient d’avoir et ce que leur employeur leur offre. Je vais me permettre une petite note personnelle, j’ai le droit c’est mon article après tout, si la stratégie de santé et de bien-être prenait vraiment en compte les besoins, les attentes, les souhaits et les risques de santé des employés, les résultats sur la performance ainsi que sur l’engagement des équipes n’en seraient que meilleurs. Voyons comment combler le gap pour répondre aux besoins des employés.

Inactivité physique et manque de sommeil

 

Quand on sait que la sédentarité est devenue, comme le tabac, un tueur silencieux et qu’elle est le 4ème facteur de risque de mortalité dans le monde, on ne peut ignorer cet aspect de la santé physique des employés. Et les vagues de confinement et de télétravail subies en 2020 n’ont pas amélioré ces chiffres ! Encourager la non-sédentarité au sein des équipes, inciter l’activité physique pendant les journées de travail, quelque soit la manière, doit faire partie de votre stratégie de bien-être au travail.

De même, un deuxième aspect de la santé physique des employés ne doit pas être négligé. Il s’agit du sommeil et des phases de repos, primordiaux pour la performance. Nous sommes fatigués tant notre rythme de vie a changé ces dernières décennies. La sédentarité, le diabète, l’obésité, la dépression, l’anxiété, une alimentation pauvre en vitamines, le stress chronique : tous ces facteurs nous vident de notre énergie et nous sommes plus fatigués qu’il y a 20 ans. Alors que nous dormons 1-2 heures de moins par nuit que nos grands-parents, nous aurions au contraire besoin de 1-2 heures de plus pour compenser le rythme effréné que nous nous infligeons.

Dans son bestseller Why We Sleep, Matthew Walker, directeur du UC Berkley’s Sleep and Neuroimaging, le coût économique engendré par le manque de sommeil est de 411 milliards de dollars aux USA, 60 milliards de dollars en Allemagne et CHF 8 milliards de francs en Suisse. Plus de 30 % de la population suisse souffre de manque de sommeil chronique.

Mais est-ce vraiment le rôle des employeurs d‘aider à pallier ce déficit planétaire de sommeil ?


Et bien si justement,
 il est important, très important même de mener des initiatives sur ce thème au sein des entreprises, au même titre que les autres initiatives en santé mentale, émotionnelle, sociale, financière et digitale.  

Selon Shleep, leader en matière d‘amélioration du sommeil en entreprise, 40% des employés souhaiteraient du soutien de leur employeur en ce qui concerne le sommeil, et cela monte à 50% pour les Millenials. De plus, la priorité #1 des employés en termes de santé physique est de ’dormir assez’.  Ajoutons à cela quelques chiffres: un employé qui souffre de manque de sommeil perd plus de deux semaines de productivité chaque année. Cela fait quelques 80mia de dollars par an, perdus à cause du manque de sommeil pour une entreprise du Fortune 500. Et je ne mentionne même pas les coûts liés à la sécurité. Un employé qui dort assez réduit ses risques d’accidents par 70%. 

Et comment et quand parle-t-on de sommeil, de repos, de récupération, au sein des organisations ? Et bien exactement comme on parle de développement des leaders, de formations et de développement personnel, de diversité, etc. On commence par en parler lors de séminaires ou de formations spécifiques sur le sujet, avec des experts dans le domaine. Puis on répond aux besoins et aux risques identifiés. Cela peut prendre plusieurs formes : 

  1. Encourager les périodes de repos

Cela commence par s’assurer que les employés prennent leurs vacances ou ne sont pas en excédent d’heures supplémentaires telles qu’ils cumulent des semaines de 60 heures. Cela implique aussi d’encourager les employés à prendre leur pause de midi, à avoir une règle qui limite les meetings sauf urgence entre 12h et 14h, après 17h ou le vendredi après-midi.  

  1. Avoir une culture qui valorise la déconnection

En effet, si l’employé ne se sent pas libre de faire une/des pauses dans sa journée, loin de son téléphone ni de ses mails, les risques de perturbation du sommeil et de non-récupération commencent déjà. Le droit de ne pas être joignable, de faire la sieste si besoin ou de se coucher à 21h restent des droits fondamentaux.  

  1. Offrir des lieux de repos ET encourager leur utilisation en donnant l’exemple 

Certains employeurs offrent des salles de repos et de méditation, juste magnifiques et tellement propices à la détente et à la récupération. Tellement que ces salles sont utilisées au grand maximum… à 20 % de leur capacité, parce que la culture est telle que les employés ne se sentent pas libres d’utiliser de tels lieux sous peine d’être jugés négativement. Si, cet exemple est véridique, je l’ai vécu avec deux employeurs. Alors ayez de tels endroits, c’est une vraie demande des employés, mais surtout faites en sorte que votre équipe de management les utilisent aussi pour montrer l’exemple et ainsi envoyer le bon message, c’est-à-dire que c’est bien et bon de prendre du temps pour se reposer/ressourcer pendant son temps de travail. Cela n’affectera en rien la performance, bien au contraire.  

  1. Accompagnement des travailleurs en équipes de nuit  

Il existe des accompagnements par des experts du travail de nuit, qui passent 24h avec les équipes et leur expliquent les cycles de sommeil, le rythme circadien, l’importance de la nutrition la nuit et surtout de comment mieux récupérer la journée. On sait que les travailleurs de nuit, sur le moyen et long terme, sont en bien moins bonne santé que ceux qui travaillent le jour ; il est donc important d’accompagner ces travailleurs. 

Alors oui, la santé physique a été relayée au second plan ces dernières années par rapport à toutes les questions de santé psychique, sociale, émotionnelle, financière, digitale. Néanmoins, cela ne veut pas dire que les entreprises doivent arrêter d’inclure des éléments de santé et de bien-être physique dans leur stratégie, bien au contraire.  

Quand on connait l’impact de la sédentarité sur la performance des employés, et quand on sait ce que le manque de sommeil coute aux entreprises, il n’y a pas à hésiter. Ces éléments doivent être intégrés à toute stratégie, d’autant plus que aussi bien l’activité physique que le sommeil et le repos sont les fondements de la résilience et de la santé mentale et psychique des employés.  

 

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Delphine Caprez